09 mai 2012 - Chapitre 3

Première session du Comité préparatoire de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires
(Vienne 30 avril- 11 mai 2012)

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Intervention de M. Jean-Hugues SIMON-MICHEL
Ambassadeur, Représentant permanent de la France
auprès de la Conférence du Désarmement
Chef de la délégation française

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Chapitre 3

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Vienne, 9 mai 2012


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Monsieur le Président,

La délégation française s’associe pleinement à la déclaration prononcée par l’Union européenne.

Monsieur le Président,

La dernière Conférence d’examen du TNP en 2010 a vu la réaffirmation du droit des Etats à bénéficier des usages pacifiques de l’énergie nucléaire défini à l’article IV, dans le cadre de confiance et de coopération propice à son développement offert par le Traité et dans les meilleures conditions de sûreté, de sécurité et de non-prolifération.

Un an après la catastrophe de Fukushima, nous devons faire un premier constat. La croissance électronucléaire dans le monde devrait se poursuivre à moyen terme pour répondre à la demande énergétique et faire face au changement climatique.

La France recourt à l’énergie nucléaire depuis plus de 30 ans. Elle exploite aujourd’hui 58 réacteurs produisant 75 à 80% de son électricité. Ce schéma énergétique permet aujourd’hui à la France de posséder un savoir-faire unique dans la conception et l’exploitation dans la durée de centrales nucléaires.

La France contribue au développement du nucléaire au plan mondial au travers de nombreuses coopérations internationales en faisant bénéficier ses partenaires de ses compétences. Par ailleurs, elle soutient activement l’action de l’AIEA dans la promotion de l’énergie nucléaire et entend poursuivre et renforcer encore ce soutien, en particulier en matière de développement des ressources humaines dans le domaine nucléaire qui constitue pour nous un enjeu majeur. La France accueille chaque année de nombreuses formations et ateliers en lien avec la mise en place d’un programme électronucléaire. Elle va renouveler cet été un partenariat avec l’AIEA en organisant pour la seconde année une session de formation sur les fonctions d’encadrement et de gestion en vue du lancement et du développement de programmes électronucléaires.

Dans le domaine de la formation également, l’Institut international de l’énergie nucléaire (I2EN), dont la création a été annoncée en 2010, est aujourd’hui en place et pleinement opérationnel pour jouer son rôle de coordinateur de l’offre française de formation en matière nucléaire.

Nous sommes convaincus qu’un développement responsable de l’énergie nucléaire civile, c’est-à-dire répondant aux standards les plus strictes en matière de sûreté, de sécurité et de non-prolifération, contribue à la mise en œuvre du TNP et renforce la légitimité du régime international de non-prolifération.

Il est en effet impératif de nous assurer que le développement du nucléaire civil n’aidera jamais un pays qui participe à la prolifération. Cet impératif de base est au cœur du TNP. Si le Traité reconnaît à son article IV le droit inaliénable des Etats à développer les usages pacifiques de l’énergie nucléaire, ce droit n’est pas inconditionnel. Aux termes mêmes du Traité, son exercice est conditionné à une finalité pacifique, au respect des engagements de non-prolifération et à une mise en œuvre satisfaisante des garanties de l’AIEA.

Pour pouvoir développer une pleine coopération bilatérale, la France encourage donc tous ses partenaires à compléter leur accord de garanties généralisées par un protocole additionnel et à adhérer aux conventions internationales pertinentes dans le domaine nucléaire. Nous proposons également de suspendre toute coopération nucléaire avec les pays qui ne respecteraient pas leurs obligations internationales.

Monsieur le Président,

L’expertise de la France dans le domaine nucléaire l’a conduite à s’intéresser de longue date et à promouvoir les initiatives liées aux approches multilatérales du cycle du combustible.

C’est pourquoi, la France souhaite promouvoir des solutions pragmatiques et concrètes, respectueuses du marché et des besoins des pays bénéficiaires dans le respect du TNP. Elle a coparrainé la création de la banque internationale d’UFE sous l’égide de l’AIEA en décembre 2010 et soutenu les initiatives russe de réserve de combustible à Angarsk et britannique de NFA (Nuclear Fuel Assurance).

Monsieur le Président,

25 ans après la catastrophe de Tchernobyl, l’accident survenu le 11 mars 2011 à la centrale de Fukushima-Daiichi représente un évènement majeur dans l’histoire de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.

L’adoption du Plan d’action de l’AIEA sur la sûreté nucléaire en septembre dernier a constitué une étape essentielle vers le renforcement de la sûreté nucléaire au niveau mondial. La France est déterminée à contribuer activement à la mise en œuvre de ce plan d’action de l’AIEA notamment par la mise à disposition de son expertise.

Mon pays a formulé très tôt des propositions concrètes sur l’établissement d’un mécanisme international d’intervention rapide et d’un réseau international de centres nationaux et régionaux de formation à la gestion de crise nucléaire, afin que les Etats membres de l’AIEA s’impliquent davantage dans ces domaines, sous les auspices de l’Agence.

Le maintien des plus hauts niveaux de sûreté dans les installations nucléaires procède d’une démarche d’amélioration continue. Dans ce domaine, ma délégation soutient le développement et la généralisation des revues par les pairs, sur une base systématique et régulière, dans chaque pays mettant en œuvre un programme électronucléaire, et dont les résultats doivent être rendus publics.

La France a décidé de soumettre toutes ses installations nucléaires à des évaluations complémentaires de sûreté. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a remis le 3 janvier 2012 ses premières conclusions de l’audit commandé pour tirer les leçons de l’accident de Fukushima. Il apparaît que l’ensemble des installations nucléaires françaises soumises à l’audit présente un niveau de sûreté satisfaisant pour pouvoir continuer d’être exploitées. Les ministres chargés de la sûreté nucléaire rendront un rapport en septembre prochain sur la mise en œuvre des prescriptions de l’ASN. Enfin, les tests de résistance réalisés par les Etats de l’Union Européenne font actuellement l’objet d’une évaluation par les pairs.

Sur le plan international, nous devons également agir à l’universalisation et au renforcement des instruments juridiques existants, en particulier, les quatre conventions relatives à la sûreté nucléaire. Concernant l’importante question de la responsabilité civile nucléaire (RCN), la France souhaite appeler l’attention de l’ensemble des Etats parties sur l’importance de l’universalisation d’un régime de responsabilité civile nucléaire fondé sur les Conventions de Vienne, de Paris et de leur protocole commun.

Monsieur le Président,

Dans le domaine de la sécurité nucléaire, conformément à l’engagement pris au Sommet de Washington en avril 2010, la France a accueilli en novembre 2011 une mission IPPAS (International Physical Protection Advisory Service) et accueillera en 2013, en collaboration avec l’AIEA, le premier séminaire international qui sera consacré aux enseignements de ce type de missions.

Par ailleurs, la France est particulièrement impliquée sur le sujet de la sûreté et de la sécurité des sources radioactives et soutient les efforts internationaux déployés par l’AIEA pour améliorer la gestion sûre et sécurisée des sources radioactives. Nous avons ainsi procédé à un premier travail de recensement de l’ensemble des sources d’origine française exportées dans le monde afin de mener, si cela s’avère nécessaire, les actions de sécurisation ou de rapatriement des sources usagées pouvant présenter des risques.

Monsieur le Président,

Comme l’a rappelé le plan d’action adopté par la Conférence d’examen du TNP en mai 2010, l’atome a un rôle essentiel à jouer, hors de la production d’énergie, dans les domaines de la santé, de l’agriculture ou de la gestion des ressources en eau en faveur du développement des pays les plus pauvres afin de répondre à leurs besoins réels. La France salue le rôle moteur de l’AIEA dans ce domaine qui, par son action en faveur des sciences et applications nucléaires et son programme de coopération technique, contribue activement à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement.

Monsieur le Président,

Le développement responsable de l’énergie nucléaire constitue un enjeu essentiel pour l’avenir de notre planète. Nous devons poursuivre notre action pour promouvoir ce développement qui permettra à la communauté internationale d’apporter des réponses aux défis économiques, humains et environnementaux qui sont devant nous. En revanche, plus que jamais, la sûreté nucléaire doit constituer pour nous la priorité absolue et guider nos actions en matière de développement de l’énergie nucléaire. C’est une priorité collective.

Monsieur le Président, je vous remercie.

publié le 08/06/2012

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