20.05.2014 - Audition de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, devant la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale [en]
« Une séance de négociation avec l’Iran a eu lieu la semaine dernière. Il était prévu que l’on commencerait à rédiger un accord ; cela n’a pas été possible. Je rappelle que la négociation se termine théoriquement fin juillet mais qu’elle peut être prolongée de six mois en tant que de besoin. Des progrès ont eu lieu à propos du réacteur d’Arak : si les Iraniens veulent trouver une solution, la technique le permet. En revanche, l’absence d’accord est patente pour ce qui concerne l’enrichissement, et les valeurs de référence des négociateurs sont considérablement éloignées : alors que le groupe « 5+1 » évoque quelques centaines de centrifugeuses, l’Iran compte en centaines de milliers ! Cette divergence a des conséquences sur la question du « break out » autrement dit le temps nécessaire pour que nous puissions réagir au cas où l’Iran, ayant signé l’accord, ne respecterait pas sa signature.
Pour le moment, le différend avec la Russie à propos de l’Ukraine n’a pas d’incidence au sein du groupe 5+1 sur la négociation avec l’Iran, les Russes ne tenant pas à ce que les Iraniens se dotent de l’arme nucléaire. La Chine est d’une grande prudence dans cette affaire. Elle est très sensible à l’argument que l’annexion de la Crimée par la Russie donne aux pays qui veulent disposer de l’arme nucléaire. Rappelez-vous : en 1994, l’Ukraine a renoncé au nucléaire en contrepartie du fait que sa sécurité territoriale serait garantie, notamment par la Russie ; vingt ans plus tard, non seulement la Russie ne garantit pas l’intégrité du sol ukrainien mais elle envahit la Crimée. Il en résulte que certains pays sont fondés à se dire qu’ils n’ont pas de meilleure garantie que l’arme atomique. Au cours des 25 dernières années, Afrique du Sud mise à part, les trois pays qui ont renoncé au nucléaire sont la Libye, l’Irak et l’Ukraine ; voilà qui peut donner à penser ».