Conférence d’examen du traité de non-prolifération nucléaire (TNP) - Déclaration commune de la République populaire de Chine, de la France, de la Fédération de Russie, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et des Etats-Unis d’Amérique - 5 mai 2010

Les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, la France, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et la République populaire de Chine réaffirment leur soutien ferme et indéfectible au Traité sur la non prolifération des armes nucléaires (TNP) à l’occasion de la 8ème Conférence d’examen du Traité.

Le TNP est indispensable pour préserver la paix et la sécurité mondiale de la menace de prolifération des armes nucléaires. Il a bien servi la communauté internationale durant les quatre décennies écoulées. Il demeure le fondement du régime de non prolifération nucléaire, de la poursuite collective du désarmement nucléaire et des utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire. Nous soulignons qu’il importe que tous les Etats mettent en œuvre et respectent intégralement le Traité, et nous réaffirmons notre engagement sans équivoque en faveur du Traité et de son renforcement lors de la conférence d’examen, afin qu’il puisse relever efficacement les défis actuels et pressants auxquels nous sommes confrontés.

Nous réaffirmons également notre détermination à donner suite aux résultats des Conférences d’examen de 1995 et 2000. Nous nous félicitons des débats constructifs et de l’atmosphère positive des comités préparatoires au 8ème cycle d’examen, ainsi que de l’accord conclu à New York en mai 2009 sur l’ordre du jour et les règles de procédure de la Conférence d’examen. Nous estimons que tout cela, conjugué au succès du Sommet du Conseil de Sécurité des Nations Unies sur la non prolifération nucléaire et le désarmement nucléaire, ainsi que l’adoption unanime de la résolution 1887, démontre la volonté commune de la communauté internationale d’œuvrer à un monde plus sûr pour tous et à créer les conditions d’un monde sans armes nucléaires, conformément aux objectifs énoncés dans le TNP, d’une manière qui promeuve la stabilité internationale et sur la base du principe d’une sécurité non diminuée pour tous.

Nous attachons une grande importance à l’universalisation du TNP. Nous exhortons tous les États qui ne sont pas parties au traité à y adhérer en tant qu’états non doté d’armes nucléaires et, en attendant leur adhésion, à en respecter les dispositions. Nous sommes prêts à travailler avec les États Parties afin de coopérer avec les non Parties en vue de réaliser cet objectif.

En tant qu’états dotés d’armes nucléaires, nous réaffirmons notre engagement durable à remplir nos obligations aux termes de l’article VI du TNP, ainsi que notre responsabilité continue de prendre des mesures concrètes et crédibles en vue d’un désarmement irréversible, comprenant des dispositions en matière de vérification. Nous rappelons nos discussions approfondies à Londres, en septembre 2009, sur les défis en matière de renforcement de la confiance, de vérification et de respect des obligations, liés à la réalisation de nouveaux progrès vers le désarmement et la non prolifération, ainsi que sur les mesures permettant de répondre à ces défis. Nous rappelons les progrès et les efforts sans précédent accomplis par les États dotés d’armes nucléaires en matière de réduction des armements nucléaires, de désarmement, de renforcement de la confiance et de transparence depuis la fin de la Guerre froide, et notons avec satisfaction que les stocks désarmements nucléaires n’ont jamais atteint des niveaux aussi bas au cours du demi-siècle écoulé. Nos contributions individuelles aux efforts systématiques et progressifs déployés en ce sens ont été et seront soulignés par chacun d’entre nous. Tous les autres Etats doivent contribuer à la réalisation de ces objectifs de désarmement en créant l’environnement de sécurité requis, en apaisant les tensions régionales, en promouvant la sécurité collective et en réalisant des progrès dans tous les domaines du désarmement.

Nous soutenons le Traité conclu entre les États-Unis d’Amérique et la Fédération de Russie sur des mesures visant à de nouvelles réductions et limitations des armements stratégiques offensifs signé le 8 avril 2010 à Prague (« New Start »). Lorsque ce traité aura été intégralement mis en œuvre, le nombre d’armes nucléaires déployées n’aura jamais été aussi bas depuis les années 1950. Nous considérons qu’il constitue une mesure importante dans la mise en œuvre de l’article VI, qui promouvra la stabilité internationale et une sécurité non diminuée pour tous grâce à la confiance mutuelle, l’ouverture, la prévisibilité et la coopération, et contribuera ainsi à créer les conditions permettant de progresser vers nos objectifs de désarmement et d’édifier une base solide pour répondre aux menaces que représentent la prolifération nucléaire et le terrorisme nucléaire.

Nous réaffirmons notre détermination à maintenir nos moratoires respectifs sur les explosions nucléaires expérimentales avant l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et appelons tous les États à s’abstenir de procéder à une explosion expérimentale d’arme nucléaire. Ces moratoires, bien qu’importants, ne se substituent pas à des engagements juridiquement contraignants dans le cadre du TICE. Nous poursuivrons nos efforts visant à une entrée en vigueur rapide du TICE et à assurer son universalité et invitons tous les États qui ne l’ont pas encore fait à signer et ratifier ce traité. Nous reconnaissons qu’un élément clé de la mise en œuvre effective de l’article VI et de la prévention de la prolifération nucléaire est la négociation du traité sur l’interdiction de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires (FMCT). Un FMCT contribuerait à l’arrêt de la production des composants essentiels nécessaires pour les armes nucléaires. Nous appelons à un démarrage rapide des négociations sur le FMCT à la Conférence sur le désarmement.

Nous soulignons l’importance de l’interdiction des armes chimiques, biologiques et à toxines pour réaliser l’objectif de l’article VI et engageons vivement tous les États qui ne l’ont pas encore fait à signer, ratifier et mettre en œuvre la Convention sur les armes chimiques et la Convention sur les armes biologiques et à toxines.

La prolifération des armes nucléaires sape la sécurité de tous les pays. Elle fait reculer la cause du désarmement, en particulier du désarmement nucléaire, et compromet les perspectives de renforcement de la coopération internationale en matière d’énergie nucléaire, notamment le rôle que nous souhaitons voir jouer à une telle coopération pour lutter contre le changement climatique et assurer un développement durable de l’énergie nucléaire. Nous réaffirmons que tous les États parties doivent veiller à s’acquitter strictement de leurs obligations en matière de non prolifération au titre du TNP et œuvrer activement à faire en sorte que les autres respectent les leurs.

Les risques de prolifération que présente le programme nucléaire iranien demeurent une grave source de préoccupation pour nous. Nous soulignons qu’il importe que l’Iran se conforme intégralement et immédiatement à ses obligations internationales. Nous exhortons l’Iran à répondre aux préoccupations de la communauté internationale en se conformant promptement et intégralement aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies et aux exigences de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Nous réaffirmons notre ferme soutien aux engagements pris dans le cadre des Pourparlers à Six et engageons vivement la République populaire démocratique de Corée à les respecter, notamment la dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule coréenne conformément à la déclaration commune de septembre 2005, et nous réaffirmons notre ferme appui aux Pourparlers à Six. Nous demeurons résolus à parvenir à un règlement satisfaisant de ces dossiers par des moyens diplomatiques.

Nous soulignons l’importance fondamentale d’un système efficace de garanties de l’AIEA pour prévenir la prolifération nucléaire et faciliter la coopération dans le domaine de l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. Nous appelons les États non dotés d’armes nucléaires qui ne l’ont pas encore fait à mettre en œuvre dès que possible un accord de garanties généralisées, ainsi que le prévoit l’article III, ou un protocole modifié sur de petites quantités. Nous nous félicitons du fait que 131 États aient signé un protocole additionnel et que 98 États en appliquent un. Nous prenons acte de la position de l’AIEA selon laquelle elle ne peut vérifier de manière crédible l’absence d’activités nucléaires non déclarées sans un protocole additionnel, et appelons tous les États qui ne l’ont pas encore fait à prendre les mesures nécessaires pour appliquer le protocole. Nous estimons que l’accord de garanties généralisées assorti d’un protocole additionnel devrait devenir la norme de vérification universellement reconnue et sommes prêts à offrir le soutien nécessaire. Nous affirmons notre appui au nouveau directeur général de l’AIEA et collaborerons avec lui afin d’accroître les capacités de l’Agence. Nous demeurons résolus à faire en sorte que l’AIEA soit dotée des ressources et de l’autorité nécessaires pour s’acquitter de ses responsabilités en matière de garanties, notamment détecter et dissuader toute violation. Conformément au statut de l’AIEA, lorsqu’une violation est établie par le conseil des gouverneurs de l’AIEA, l’affaire devrait être portée à l’attention immédiate du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui appréciera si elle constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales. Nous soulignons la responsabilité première du Conseil de sécurité de lutter contre ces menaces.

Les zones exemptes d’armes nucléaires qui sont établies conformément à l’article VII du Traité et aux directives adoptées lors de la session de 1999 de la Commission du désarmement des Nations Unies, et qui sont pleinement respectées, ont apporté et continuent à apporter une contribution importante au renforcement du régime international de non prolifération nucléaire sous tous ses aspects, ainsi qu’à la réalisation du désarmement nucléaire et à l’objectif ultime d’un désarmement général et complet sous un contrôle international effectif. Nous sommes favorables à des consultations et une coopération accrues entre les Parties aux zones existantes et appelons à étudier la possibilité de créer de nouvelles zones, lorsque c’est approprié, et conforme aux souhaits des États régionaux. Nous reconnaissons qu’il est important de créer des zones régionales exemptes d’armes de destruction massive. Nous accueillons favorablement un dialogue visant à résoudre les questions pendantes liées aux zones dénucléarisées.

Nous sommes attachés à une mise en œuvre intégrale de la résolution sur le Moyen-Orient adoptée en 1995 par les États parties au TNP et appuyons tous les efforts en cours à cette fin. Nous sommes prêts à examiner toutes les propositions pertinentes au cours de la Conférence d’examen afin de parvenir à une décision agréée visant à prendre des mesures concrètes en ce sens.

Nous prions instamment tous les États de prendre chacun toutes les mesures appropriées en accord avec les autorités et la législation nationales, et conformément au droit international, en vue d’empêcher le financement de la prolifération et les transports proliférants, de renforcer les contrôles à l’exportation, de sécuriser les matières sensibles et de contrôler les transferts de technologies intangibles. Nous réaffirmons notre soutien au Groupe des Fournisseurs nucléaires et au Comité Zangger et notons le rôle important de ces deux mécanismes internationaux de contrôle des exportations pour la sauvegarde du régime de non prolifération nucléaire.

En 1995, nous avons publié des déclarations séparées sur les assurances de sécurité, qui ont été notées dans la résolution 984 (1995) du Conseil de sécurité des Nations Unies. Certains d’entre nous ont, par la suite, émis des déclarations sur leurs assurances. Nous notons l’importance attachée par les États non dotés d’armes nucléaires aux assurances de sécurité et le rôle de ces dernières dans le renforcement du régime de non prolifération. Nous sommes prêts à engager des discussions de fond sur les assurances de sécurité à la Conférence du désarmement.

Nous estimons que la menace que fait peser l’ambition d’acteurs non étatiques d’acquérir des matières fissiles ou des armes nucléaires a modifié la nature du défi posé par la prolifération. Cette menace est à la fois réelle et urgente. Nous soulignons que l’acquisition d’armes nucléaires ou de matières connexes et d’expertise technique par des acteurs non étatiques constituerait une menace pour la paix et la sécurité internationale. Nous réaffirmons l’importance d’une mise en œuvre intégrale des résolutions 1540 (2004), 1673 (2006) et 1810 (2008) du Conseil de sécurité des Nations Unies, ainsi que de la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire. Nous appelons tous les États parties à ratifier l’amendement à la Convention sur la protection physique des matières nucléaires, afin d’obtenir les deux tiers de ratifications nécessaires pour que cet amendement puisse entrer en vigueur. Nous invitons les États parties à développer et soutenir une action mondiale coordonnée en matière de sécurité nucléaire, qui fait partie intégrante de l’approche de la communauté internationale concernant l’agenda nucléaire global. Nous réitérons notre engagement pris lors du Sommet sur la sécurité nucléaire de 2010 de renforcer la sécurité nucléaire et de réduire la menace de terrorisme nucléaire. Nous saluons l’appel du président Obama à sécuriser toutes les matières nucléaires vulnérables dans un délai de quatre ans et nous y rallions.

Nous reconnaissons le droit inaliénable de tous les États parties au TNP, reconnu à son article IV, de développer la recherche, la production et l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, sans discrimination et conformément aux dispositions pertinentes du traité et aux principes pertinents sur les garanties. Nous relevons la demande croissante d’énergie nucléaire et soulignons son potentiel pour lutter contre le changement climatique, faciliter la réalisation des Objectifs de Développement du Millénaire et le développement durable, assurer la sécurité énergétique ainsi que pour des applications non électriques essentielles telles que la médecine nucléaire, l’agriculture et l’industrie. Nous soulignons l’importance particulière de la coopération internationale, tant par l’intermédiaire de l’AIEA qu’au niveau bilatéral, pour les États parties qui ne maîtrisent pas les technologies nucléaires. Nous sommes disposés à œuvrer activement avec les États parties souhaitant développer l’énergie nucléaire à des fins pacifiques en accord avec leurs obligations au titre du TNP et des garanties de l’AIEA. Nous saluons l’issue de la Conférence de Paris de mars 2010 sur l’accès à l’énergie nucléaire civile ainsi que les échanges fructueux sur les défis et les opportunités liés au développement durable de l’énergie nucléaire.

Nous appelons au développement de l’énergie nucléaire dans une culture d’ouverture et de transparence renforçant la confiance entre voisins, et soulignons la nécessité de promouvoir le développement durable de l’énergie nucléaire à des fins pacifique dans un cadre garantissant effectivement la sûreté, la sécurité, la non prolifération ainsi que des arrangements appropriés en matière de responsabilité nucléaire civile au bénéfice de tous. Nous saluons les travaux de l’Agence internationale de l’énergie atomique pour définir des approches multilatérales du cycle du combustible nucléaire, y compris des garanties d’approvisionnement en combustible nucléaire et des mesures associées, comme moyen efficace de faciliter la coopération nucléaire conformément à l’article VI et de répondre au besoin croissant de combustible nucléaire et de services dans ce domaine, de préserver le marché concurrentiel ouvert, de répondre aux véritables besoins des clients et de renforcer la non prolifération. Nous prenons note des diverses propositions afférentes qui ont été présentées et nous nous félicitons de l’approbation, par le Conseil des Gouverneurs de l’AIEA, de l’initiative de la Fédération de Russie ainsi que de la signature, le 29 mars 2010, de l’Accord entre l’AIEA et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d’établir une réserve d’uranium faiblement enrichi fournie à l’AIEA pour ses États membres. Nous engageons vivement le Conseil des Gouverneurs à convenir dès que possible de nouvelles mesures à cette fin.

Les États parties ont le droit de se retirer du TNP en vertu de l’article X. Toutefois, nous appelons le Conseil de Sécurité des Nations Unies à traiter sans tarder toute notification de retrait du traité adressée par tout État partie, y compris les évènements décrits dans la notification de retrait dudit État, requise en vertu de l’article X. Un État partie demeure responsable au regard du droit international des violations du TNP commises avant son retrait. Nous sommes favorables à des discussions sur les modalités selon lesquelles les États parties au TNP pourraient collectivement répondre à toute notification de retrait, y compris sur la cession des équipements et matières acquis ou développés durant son appartenance au TNP. En même temps, nous sommes convaincus que toute décision prise concernant un retrait du TNP ne devrait pas aboutir à la révision de l’article X, à rouvrir le texte du traité ou à saper les principes et normes du droit international généralement reconnus.

La recherche d’un monde plus sûr pour tous et la création des conditions d’un monde sans armes nucléaires conformément aux objectifs du TNP exigeront une coopération internationale déterminée, à long terme, fondée sur l’intérêt commun. Notre attachement à cet objectif est in2branlable. Nous appelons tous les États parties à saisir l’occasion de la Conférence d’examen pour renforcer encore le régime international de non prolifération nucléaire en recommandant une série de mesures concrètes, réalistes et réalisables, sur la base d’un équilibre entre les trois piliers du traité qui se renforcent mutuellement, en vue d’intensifier les efforts internationaux de lutte contre la prolifération, de réaliser des progrès démontrables en matière de désarmement, et de partager les bienfaits de la coopération nucléaire pacifique. Nous coopérerons étroitement avec les États parties, au cours de la Conférence et au-delà de celle-ci, en vue de réaliser les objectifs du TNP et les buts convenus lors de cette Conférence.

publié le 29/03/2011

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