Conférence du désarmement - Organe subsidiaire 4 [NSA] - intervention en séance plénière au nom de la France (Genève 24 mars 2022) [en]

L’Organe subsidiaire 4 traite des assurances négatives de sécurité (NSA)

Monsieur le coordinateur,

Permettez-moi de vous féliciter pour votre nomination à cette charge dans un contexte où la question des garanties négatives de sécurité revêt une importance et une urgence nouvelles.

Je remercie également l’UNIDIR pour l’éclairage historique sur le sujet apporté par le Dr. Revill à l’instant.

Monsieur le coordinateur,

Le 8 juin 2021, la Conférence du désarmement a tenu un débat thématique sur les garanties négatives de sécurité. Aujourd’hui, cette première réunion de l’organe subsidiaire 4 se tient dans un contexte sécuritaire fortement dégradé par l’agression armée non-provoquée et non-justifiée de l’Ukraine par la Russie que nous condamnons dans les termes les plus fermes. En violant l’intégrité territoriale ukrainienne, la Russie a notamment enfreint le Mémorandum de Budapest. La Russie s’était engagée, au même titre que le Royaume-Uni et les Etats-Unis, à respecter la souveraineté, l’indépendance et les frontières ukrainiennes. En contrepartie l’Ukraine a restitué à la Russie les armes nucléaires qui avaient été déployées sur son territoire et l’Ukraine a adhéré au TNP en tant qu’Etat non-doté. Cette violation, par la Russie, de ses engagements internationaux l’éloigne encore davantage de ce que la communauté internationale dans son ensemble – et en particulier les Etats non-dotés – sont en droit d’attendre d’un Etat doté de l’arme nucléaire, c’est –à-dire la responsabilité et le plein respect de ses obligations internationales. Nous aurons à cœur de porter ce sujet dans le cadre des travaux que nous conduirons au sein de cet organe subsidiaire.

Dans ce contexte dégradé, la France entend l’aspiration légitime des Etats non dotés d’armes nucléaires parties au TNP au sujet des garanties contre le recours ou la menace de recours aux armes nucléaires. Etat doté responsable, la France a pris de longue date des engagements forts, unilatéraux ou bien dans le cadre de traités créant des zones exemptes d’armes nucléaires. Ces engagements confèrent des garanties de sécurité aux Etats non-dotés parties au TNP et respectueux de leurs obligations :

  • Premièrement, les garanties de sécurité octroyées par la France ont été présentées dans une déclaration unilatérale faite à la Conférence du désarmement en avril 1995. Le Conseil de Sécurité des Nations unies en a pris acte dans ses résolutions 984 en 1995, 1887 en 2009 et 2310 en 2016. Elle considère ces engagements comme juridiquement contraignants ;
  • Deuxièmement, les garanties négatives de sécurité accordées par la France ont été réaffirmées au plus haut niveau. Le Président de la République s’est engagé à ne pas utiliser ou menacer d’utiliser d’armes nucléaires contre tout Etat non doté d’armes nucléaires partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, qui respecte ses obligations internationales de non-prolifération.
  • Troisièmement, l’octroi d’assurances négatives de sécurité dans un cadre régional constitue une voie importante pour le désarmement et la non-prolifération nucléaires. C’est pourquoi nous avons apporté notre soutien à la constitution de zones exemptes d’armes nucléaires, et avons accordé des garanties négatives de sécurité à une centaine d’Etats, dans le cadre des protocoles aux traités instituant des zones exemptes d’armes nucléaires dans plusieurs régions du monde : le Traité de Tlatelolco, le Traité de Rarotonga, le Traité de Pelindaba, le Traité de Semipalatinsk. La France a également signé une déclaration croisée sur le statut exempt d’armes nucléaires de la Mongolie.

La France se tient prête à élargir ce dispositif, conformément aux principes adoptés par consensus en 1999 par la Commission du désarmement. Afin de progresser vers la signature du protocole au traité de Bangkok instituant une zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud-Est qui permettrait de la rendre pleinement opérationnelle, nous souhaitons poursuivre le dialogue entre les pays de l’ASEAN et le P5. Il est également important que les pays de l’ASEAN se saisissent de la question. A l’approche de la conférence d’examen du TNP, avancer dans la signature du protocole à ce traité permettrait de progresser dans la mise en œuvre du plan d’action de 2010. Cette avancée soulignerait la contribution des zones exemptes d’armes nucléaires au renforcement du régime de non-prolifération et à la réalisation des objectifs du désarmement nucléaire. Ma délégation souhaiterait que cet organe subsidiaire permette aux Etats membres de l’ASEAN de nous informer sur les prochaines étapes de ce traité important.

Par ailleurs, nous soutenons la création d’une zone exempte d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs au Moyen-Orient, conformément à la résolution sur le Moyen Orient adoptée en 1995 sur la base du dialogue et sans compromettre la sécurité de quiconque. C’est un objectif important, qui passe notamment par une résolution durable des crises de prolifération et l’adhésion de tous les Etats de la région aux conventions pertinentes dans le cadre d’un processus fondé sur le consensus et inclusif, dans son format comme dans sa substance pour viser des résultats effectivement vérifiables.

  • Enfin, notre doctrine de dissuasion est également une garantie, car elle est strictement défensive. L’emploi de l’arme nucléaire ne serait en effet concevable que dans des circonstances extrêmes de légitime défense, droit reconnu par la Charte des Nations Unies.

Monsieur le coordinateur,

Nous aurons l’occasion de revenir lors des prochaines réunions sur la pertinence d’un traité multilatéral sur les garanties négatives de sécurité et sur les propositions liées au non usage en premier.

Je vous remercie Monsieur le coordinateur./.

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publié le 24/03/2022

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